cours du 12 février 2014

Question d’un étudiant sur la phrase que j’avais écrite :
« Le salut n'apparaît pas ici comme une justification juridique (la rédemption d'un prisonnier), mais comme la guérison d'une faiblesse (dont l'élément principal est la mort). »

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REDEMPTIO
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rançon
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L'otage est racheté
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La valeur de son rachat est la rançon.
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Le Christ est notre rédempteur, au sens où il a payé notre rançon.
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Néanmoins, il n'y a pas de "preneur d'otages" qui aurait pu revendiquer du Christ le paiement de cette rançon.
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En grec, Λυτρωτής.
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La rançon est le prix du rachat d'un otage.
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Même si, dans notre Tradition, nous employons fréquemment le terme de rédempteur pour qualifier le Christ, il ne faut pas prendre ce terme à la lettre, car il n'y a personne à qui le Christ a dû payer, de son sang, pour nous racheter.
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Le Père n'est pas une personne cruelle et sanguinaire qui devait recevoir du sang pour apaiser sa colère.
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Le sang du Christ, qui est la rançon pour nos péchés, nous guérit de nos péchés.
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La Rédemption, au sens chrétien orthodoxe, est une guérison.
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La justification, elle, est le fait d'être irréprochable quant à la Loi.
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La justification consiste à être juste en tout.
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Toutefois, pour être juste, il faut qu'il y ait une loi qui serve de norme.
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Et la justification légale ne donne pas la vie.
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Même la Loi divine n'a pas été facteur de vie.
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Car la mort continue son ouvrage.
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Dans l'Incarnation du Verbe, dans sa participation à notre nature, dans la vivification de notre nature humaine et dans l'invitation à suivre le Christ dans la Résurrection, là se trouve notre vie.
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Notre nature atteinte par le péché a été restaurée par le Christ, Dieu-homme.
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Cette restauration de la nature est le salut (en latin, salus; en grec, σωτηρία). C'est un mot qui signifie santé et sauvetage. Les deux notions sont très proches.
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Cf. Jn 11,12.
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Lazare est malade. Jésus dit que Lazare s'est endormi (pensant à l'endormissement de la mort). Les disciples croient que Jésus parle du sommeil, non de la mort, et disent donc que Lazare seront donc "sauvé" (au sens de guéri).
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Les trois termes (rédemption, justification et salut) sont tous bibliques et largement utilisés dans la littérature théologique.
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Toutefois, les notions que recouvrent tous ces termes ne sont pas identiques.
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Le justification est une notion juridique.
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La rédemption fait appel au phénomène de la prise d'otage.
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Le salut est d'ordre médical (sauvetage d'un danger, guérison d'une maladie).
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La rédemption peut être aussi proche de la notion de libération.
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Le Rédempteur est le libérateur; mais, toujours, il délivre d'un emprisonnement, donc il y a "quelqu'un" ou "quelque chose" qui garde l'otage prisonnier.
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Dans notre situation, ce "quelque chose" est notre propre péché.
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Attention! Ce n'est ni le Diable, ni a fortiori Dieu le Père qui tient l'homme prisonnier de la mort. Donc ce n'est ni au Diable, ni encore moins au Père que le Fils paye notre libération de son sang.
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La vision christologique d'une Église dépend de la manière dont elle conçoit l'oeuvre que le Fils est venu accomplir.
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Si l'οἰκονομία divine n'avait été qu'une justification légale, il n'y aurait pas eu besoin que le Verbe prenne chair!
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Si l'économie divine avait été un rachat de prisonnier, au sens du paiement d'une rançon, il aurait été impensable que qui que ce soit demandât le sang du Christ comme rançon.
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C'est bien au sens de la participation à notre nature, à notre chair, que nous devons entendre l'économie divine.
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L'une des personnes de la sainte Trinité s'approche de nous et, tout en restant consubstantielle aux deux autres personnes de la Trinité, elle devient aussi consubstantielle à nous.
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Le Christ est deux fois consubstantiel: consubstantiel au Père et à l'Esprit, par la divinité, et consubstantiel à l'homme, par son humanité.